Dernières paroles (1968)

De la même façon que La défense sans pareil de la forteresse Deutschkreutz constituait un brouillon de l'imminent Signes de vie, Dernières paroles prépare le terrain pour les visions aberrantes de Fata Morgana. Dans cet esprit, la présente bafouille ne fait qu'effleurer des mystères que je tenterai d'éclairer ultérieurement. Tourné en deux jours et monté en moitié moins de temps au milieu du projet Signes de vie,…

No Land's Song (2014)

Pour ma première Cinexpérience, j'ai été gratifié d'un témoignage que je ne me précipiterais pas à qualifier de film ni de documentaire, mais plutôt de reportage. Évidemment, la cause féministe pour laquelle se bat la chanteuse est plus que louable, mais en-dehors du montage assez quelconque, la notion de mise en scène est spectaculairement étrangère au métrage. Ce n'est pas parce qu'il montre des gens investis pour…

The Assassin (2015)

Chacun a sa définition du beau. En vieux con précoce que je suis, la mienne se rapproche de la tradition grecque : beau, vrai, utile, agréable, c'est un tout, je peine à dissocier les différentes dimensions de ces attributs. Aussi, le maniérisme visuel n'étant même pas fondamentalement une expérience plaisante, il ne m'inspire guère que de l'indifférence. Le format 4:3 qui s'avère particulièrement contre-productif d…

My Life Directed by Nicolas Winding Refn (2014)

Entre son lieu de tournage exotique et ses émanations anti-commerciales, les accrocs de la production d'Only God Forgives étaient une évidence avant même que quiconque ait posé le pied en Thaïlande. Cependant, cette situation n'était pas franchement inédite, et rien n'assurait que le film de Nicolas Winding Refn puisse faire l'objet d'un making-of notable. C'est pourtant dans ce projet que s'est vaguement lancée Liv…

Christine (1983)

Est-ce de la série B magistrale, ou bien une peinture incomprise de l'adolescence ? Commençant à connaître un peu le réalisateur, j'aurais tendance à croire que la vérité se situe entre les deux. Par contre, j'ai de la peine pour Carpenter, à l'imaginer jugé comme un metteur en scène bas de plafond jusque dans les sphères cinéphiles (certaines critiques likées m'ont fait mal au cœur, oui), alors que maquiller une ré…

Mistaken for Strangers (2013)

Coïncidence, dans sa démarche dynamique ce documentaire se retrouve très proche de 'My Life Directed by Nicolas Winding Refn', réalisé par la femme de NWR et découvert il y a même pas une semaine. Ici, en lieu et place de madame qui accompagne son mari pour la production thaïlandaise de Only God Forgives, et détourne progressivement le sujet depuis le tournage vers sa relation de couple, on a Tom Berninger qui accom…

La balade sauvage (1973)

Comme d'habitude, je juge le fond et les motivations plus que la forme. Parce que techniquement il n'y a rien à dire, la voix off détachée de Sissy Spacek, les airs boudeurs de Martin Sheen, les étendues infinies des Great Plains, la distance maintenue entre les personnages et le public, tout est au service d'une vision ironiquement romanesque, résolument désenchantée. La violence surgit indifféremment, les personna…

La Party (1968)

Coiffé au poteau d'un ou deux ans par Playtime et sa mythique séquence du Royal Garden, The Party n'en reste pas moins une comédie de tout premier ordre. Peter Sellers, grimé en acteur gaffeur d'origine indienne (je laisserai à d'autres le soin de se scandaliser sur son fond de teint, ouhlala), porte quasiment à lui tout seul la première moitié du film, succession de sketches fluide quoiqu'un peu linéaire, mais pas …

Little Odessa (1994)

James Gray tire la corde de la tragédie trop fort, trop longtemps, alors forcément ça finit par casser. Le début de Little Odessa met à l'aise, avec sa photographie appliquée et ses personnages archétypaux qui permettent de se faire très rapidement une idée de la situation ; le souci étant que le scénario ne va par la suite jamais s'éloigner des sentiers battus, plongeant avec morgue et sans retenue dans les clichés…

Buffet froid (1979)

Il paraît que Buffet froid évoque Buñuel. Je peux pas dire, je connais pas le garçon en-dehors de son toutou andalou. Par contre j'ai beaucoup pensé à un Mulholland Drive écrit par des franchouillards à la fin des années 70. La peur et l'érotisme sont remplacés par l'humour et la camaraderie, mais en-dehors de ça les mécaniques sont très similaires : brouiller et exacerber les fantasmes et les angoisses de Naomi Dep…

The Song Remains the Same (1976)

Le film, au moins autant que le concert, figure tranquillement parmi les plus folles extravagances psyché-rock des années 70. L'enregistrement et le mixage sont au poil, balancé à fond sur des enceintes le son est équilibré comme il faut, et les solos interminables à moitié improvisés de Jimmy Page, c'est quand même un truc à vivre au moins une fois (même le passage où il attaque sa guitare avec un archet a ses qual…

Évolution (2015)

S'il existait un public de femmes de 30-40 ans adeptes de films de genre, Evolution aurait fait un carton complet. Par ailleurs, le monde serait sans doute beaucoup plus marrant. Sauf que non, et du coup il ne passe que dans une poignée de salles en France, et même SC ne lui accorde pas beaucoup d'attention. Si tempérée soit mon appréciation du film, l'échec de sa distribution me rend un peu triste. Lucile Hadzih…

Midnight Special (2016)

Je sais vraiment pas par quel bout attaquer. L'histoire, les personnages, l'univers, tout fait simple, sobre, mais Jeff Nichols fait du cinéma alors le résultat est merveilleux. Je vois ce plan sur le ciel, qui dure une seconde de trop pour qu'on absorbe bien le reflet bleu fantastique qui s'y est glissé. Je vois Adam Driver qui s'approche du gamin dans une salle complètement blanche, et la lentille qui floute légèr…

Le garde du corps (1961)

Ouais, je sais, blasphème, etc. Il y a deux ans, étant donné l'aura du réalisateur bien plus que mon expérience de son cinéma, je m'imaginais avec plaisir découvrir tous les Kurosawa au fil de ma vie. Depuis, j'avais bien plus de doutes quant à mon appréciation intégrale de son art (sans remettre en cause mon admiration pour Rashomon et Les Sept Samouraïs), et aujourd'hui ça s'est confirmé. C'est assez simple, To…

Eva ne dort pas (2015)

Franchement, c'est un super test pour les amateurs de The Assassin. Parce que la visée est quasi identique : réaliser un objet d'une beauté plastique inédite, avec un périple qui s'appuie sur un contexte politique mais qui n'a pas d'autre prétention qu'offrir une expérience sensorielle mémorable. Sauf qu'ici, c'est réalisé avec trois kopeks : les décors et les costumes sont anti-somptueux, depuis la femme de ménage …

Batman (1966)

Dire que des gens ont œuvré à la restauration de ce monument du kitsch. Faith in humanity restored. Donc il y a plein de jeux de mots bidons, des interprétations ingénument cartonnées, des situations absurdes, c'est grandiose. Au-delà du comique de la chose, aussi assumé que rarement reproduit depuis, on sent l'influence très forte sur le revival de Burton vingt ans plus tard, qui lui aussi était incapable de pre…

Merci patron ! (2016)

Motivé par les notes de mes éclaireurs, la preuve que le bouche-à-oreille peut marcher et donc que le film réussit là où il pouvait réussir. Ayant fait une grande école avec des cours d'intelligence économique et d'éthique des entreprises, la surprise n'était pas au rendez-vous, mais le docu donne des visages humains à tout ce petit théâtre, et en matière de sensibilisation ça fait le boulot. On est dans le film …

Signes de vie (1968)

Aux côtés de Volker Schlöndorff, Wim Wenders ou encore Rainer Werner Fassbinder, il est courant de voir Werner Herzog cité parmi les principaux représentants du Nouveau cinéma allemand. Très certainement, Herzog appartient à une génération d'auteurs profondément marquée par la reconstruction de l'Allemagne, et la diffusion de ses court-métrages de jeunesse coïncide avec la reconnaissance critique de ce cinéma émerge…

The Servant (1963)

Ca me fait penser à Hitchcock qui aurait voulu écrire du Huysmans. Le scénario infuse une pointe de mystère et de danger dans un cadre déliquescent, jouant de la confusion des sentiments, des genres, des relations de servitude, pour plonger son personnage principal dans un état de négligence irrécupérable. Le travail de Douglas Slocombe (aussi chef op' et nominé, vingt ans plus tard, pour les deux premiers Indiana J…

Steve Jobs (2015)

Je pourrais pérorer facilement sur certains défauts du film. Il y a le fait de répéter trois fois la même scène avec les mêmes personnages pour les mêmes effets (exception faite de la dernière minute où à la fois Boyle et Fassbender rachètent le personnage dans un deus ex machina larmoyant). Il y a le script peu inspiré, assez mécanique (je plains l'actrice de la petite Lisa, sa carrière aura du mal à s'en remettre)…