Dangerous Days: Making Blade Runner (2007)

Je craignais de me lancer dans ce making-of fleuve après avoir essuyé dix minutes de commentaire superficiel et barbant de la part du sieur Scott. Sept ans et demi après avoir découvert ce film (je sors d'une séance d'archéologie fb pour retrouver cette date, si si), je n'ai pas franchement besoin qu'on me décrive ce qui se passe à l'écran. Peut-être les deux autres commentaires enregistrés sur le final cut sont-ils…

Massoud, l'Afghan (1998)

"Tout devient dangereux, mais il n'y a aucun spectacle." Le reportage atypique de Christophe de Ponfilly dépasse amplement l'acte biographique. À la fin de ce film désenchanté ressort surtout l'amitié entre le commandant Massoud et le journaliste : la réserve et l'humilité du premier sont parfois percées de notes intimes inattendues, capturées sur le vif, tandis que le second brise rapidement les prétentions d'ob…

Personne ne veut jouer avec moi (1976)

Je ne sais pas ce qui a pu motiver Herzog à tourner ce court-métrage de commande. Pour rendre service à un ami, comme avec les Médecins volants ? Par exigence contractuelle après Avenir handicapé ? Pour tourner avec des enfants de maternelle ? Ou peut-être pour filmer un corbeau parlant ? En tout cas ce n'est pas le thème de l'isolement social qui fait vibrer le réalisateur ; il reste permis de s'imaginer le para…

How Much Wood Would a Woodchuck Chuck... (1976)

Le paradoxe sublime qui voit la langue, asservie par le rendement et l'orgueil, défigurée et monstrueuse, scintiller de personnalité et d'harmonie. La transfiguration inconsciente et magnifique opérée par des commissaires-priseurs de bétail. La langue, quoiqu'outil, n'est pas conditionnée à l'objectif argumentatif du langage ; il faut la laisser s'échapper ou bien, cinéaste amish-emin, s'en défaire.

Onibaba, les tueuses (1964)

La maîtrise des lumières est incroyable, les prises de vues sont aussi impressionnantes vis-à-vis du huis clos, et le traitement du son est souvent remarquable. Dommage alors que cette luxuriance technique soit au service d'une histoire élémentaire et distendue ; il ne s'agit jamais que d'une vieille femme qui, par puritanisme et par jalousie, veut empêcher sa belle-fille de rouler des patins à un hurluberlu... non ?

Happy Feet 2 (2011)

Mince, je me suis encore faite avoir par George Miller. Il y a moins d'action que dans le premier, moins de profondeur de pensée aussi, mais l'enthousiasme est toujours présent, et l'exercice d'écriture vaut d'être étudié. Le scénario fait encore plus dérailler le héros aux mille et un visages, pour répartir le poids des événements sur les épaules de chaque personnage, un à un. Ces variations de focus sont déroutant…

La meilleure façon de marcher (1976)

Le savoir-faire technique, ou en tout cas l'inventivité, fait défaut à l'équipe de Claude Miller pour son premier long-métrage, mais l'attention est tenue par les acteurs qui s'approprient très bien leurs rôles respectifs, tout particulièrement Patrick Dewaere. Partant de l'homophobie ancrée dans son personnage, le scénario développe avec justesse, sans grossissement de traits dramatique, à la fois les conséquences …

Dagen zonder lief (2007)

Le montage et le ton du Broken Circle Breakdown m'avait mise en rogne : jouer de contrastes aussi naïfs entre un couple passionnel et une gamine cancéreuse, faut laisser ça à W9, ou bien c'est le bûcher direct. On sent que van Groeningen préparait son coup dès son deuxième long-métrage, avec ce suicide qui débarque comme un cheveu sur la soupe et tourné au ralenti s'il vous plaît, et puis il y a aussi une autre affa…

L'Énigme de Kaspar Hauser (1974)

Je triture le problème depuis plus d'un mois maintenant. Comment parler de L'Énigme de Kaspar Hauser sans rentrer en contradiction avec son aversion envers un langage trop rationnel ? Même mon orgueil ne me permettra pas d'échapper à une logique aussi élémentaire. Et me voilà déjà à manier des notions de causalité quand je voudrais de tout cœur les fuir. Le mieux à faire est de reconnaître d'emblée mon échec : je n'…

Baraka (1992)

Après avoir vu et applaudi Koyaanisqatsi, il était difficile de ne pas craindre de trouver en Baraka une photocopie léchée mais sans intérêt. C'était sans savoir que Ron Fricke était déjà chef op' du film de Godfrey Reggio, et que par conséquent, il était presque impossible qu'il soit animé par autre chose que d'excellentes intentions. Je me calme sur les négations en cascade, promis. Koyaanisqatsi parlait de pro…

Planète interdite (1956)

Il y a une énorme méprise qui entoure ce classique des space operas, et à laquelle l'affiche m'avait d'ailleurs rendue vulnérable avant que je ne parvienne au milieu du film : je parle de la croyance qu'il s'agirait d'un monument de sexisme. Clairement, Forbidden Planet capitalise sur la libido réprimée de geeks 50s en mal de space bunnies, en mettant en avant une midinette ingénue qui tombe dans les bras de militai…

Théorème (1968)

Teorema est aux antipodes de l'agressivité graphique de Salò, mais les deux films partagent une même révolte contre la bourgeoisie. Terence Stamp, magnétique, vient bouleverser les préjugés (sentimentaux, sociaux, économiques, sexuels, artistiques...) de chacun des quatre membres d'une famille italienne cossue. Dans un second temps, abandonnés à eux-mêmes, ils s'auto-détruisent un à un, incapables d'embrasser les id…

Le dernier des Mohicans (1992)

Sans passif de jeunesse avec ce film, je n'ai pas trouvé quoi en tirer. The Last of the Mohicans est une bizarrerie dans la filmographie de Michael Mann, mais les incursions lyriques auxquelles il se livre ne sont pas toutes heureuses. Qu'il s'agisse du thème orchestral de vingt tonnes, de la romance cliché, ou des regards de cent mètres de long que les acteurs s'échangent à chaque scène (parfois au ralenti, youpi),…

Last Action Hero (1993)

Touchant dans son quart d'heure initial, vu à travers les yeux d'un gosse cinéphile, le film s'essouffle paradoxalement quand il fait passer l'action au premier plan. Au carrefour de la fantaisie du cinéma d'aventure des années 80 et de l'humour référencé qui obsède l'industrie depuis les années 2000, la tentative de parodie des codes du blockbuster a tendance à s'abîmer dans une liste échevelée de clins d'œil trop …

L'homme sans passé (2002)

Je n'osais pas m'enfermer dans une salle avec De l'autre côté de l'espoir, mais je voulais tout de même vérifier qu'Aki Kaurismäki ne me parlait pas. C'est chose faite avec L'Homme sans passé, histoire douce-amère d'un quadra amnésique, qui cache sa vacuité derrière un manichéisme naïf propre à séduire les festivaliers (le système social est indifférent et cruel mais les damnés de la terre se serrent les coudes et o…

Uzak (2002)

Procrastination et misère sentimentale : programme alléchant du troisième long-métrage de Nuri Bilge Ceylan. Le scénario est comme attendu taciturne, bien qu'il jongle finalement avec des réflexions déjà très proches de Winter Sleep. (Pour rappel, sur la forme, la logorrhée de la Palme 2014 vaut pour antithèse de son cinéma, conçue en partie comme réponse à ses détracteurs.) Il est tentant d'inscrire Uzak dans un…

Les glaneurs et la glaneuse (2000)

Difficile transition entre l'équilibre de Richard Brouillette et le documentaire "à l'instinct" d'Agnès Varda. L'impression qu'elle ouvre des portes au hasard, trace des parallèles plus ou moins arbitraires... Surtout quand elle vient parler de son processus créatif, sans rapport apparent avec les anonymes qu'elle est allée filmer. Des bonnes et douces intentions contre le gaspillage, mais dont la matérialisation fr…

L'encerclement - La démocratie dans les filets du néolibéralisme (2008)

Cqfd... Le montage et même la couleur s'effacent pour laisser la parole aux intellectuels et à une poignée d'intertitres. Les discours ont manifestement été millimétrés au mot près afin de maximiser le potentiel pédagogique du documentaire, et c'est une franche réussite (malgré sa rareté, j'avais déjà pu observer l'efficacité de cette didactique dans Poétique du cerveau, fin 2015). Doucement mais sûrement, les expli…

Kids Return (1996)

Malgré quelques jours de réflexion, je ne peux pas me départir du sentiment d'avoir assisté avec Kids Return à une version larvée de la mélancolie qui imprègne Sonatine et Hana-bi. Pris en tant que tel, Kids Return mériterait pourtant qu'on s'y attarde, qu'on y décortique la sensibilité de Kitano. Mais le film s'embarrasse d'une narration qui désarçonne, conjonction des ellipses sauvages propres au réalisateur et d'…

Z (1969)

La référence du thriller politique, indépassée depuis cinquante ans ? Conflit idéologique, attentat, propagande, conspiration, trafic d'influence, organisation paramilitaire, charognards de la presse, drame intime, tout y est. L'équilibre du scénario, touffu mais fluide, est d'autant plus incroyable que l'affaire racontée est directement inspirée d'un tournant politique majeur pour la Grèce. La mise en scène, ton…