Après avoir vu et applaudiKoyaanisqatsi, il était difficile de ne pas craindre de trouver en Baraka une photocopie léchée mais sans intérêt. C'était sans savoir que Ron Fricke était déjà chef op' du film de Godfrey Reggio, et que par conséquent, il était presque impossible qu'il soit animé par autre chose que d'excellentes intentions. Je me calme sur les négations en cascade, promis.
Koyaanisqatsi parlait de progrès, et Baraka parle de production. Les deux sont liés, mais ne se valent pas non plus ; le montage silencieux s'attache justement à mettre en évidence, pour ceux qui voudront bien l'écouter, que la croyance urbaine de vivre au summum du confort moderne est un fantasme proprement occidental, condescendant et égocentrique, au final pas si loin des mathématiques civilisationnelles de cette vieille ordure de Guéant. Sans que Ron Fricke la pointe du doigt, on reconnaît dans cette idée de confort la patte d'une propagande idéologique généralisée, qui repose sur l'inception du désir fallacieux d'être meilleur que son voisin, par le commerce d'objets et de services accessoires. Oui, c'est mon filtre Mad Men qui parle.
Dans Baraka, ce ne sont pas seulement les images qui se suffisent à elles-mêmes, éclatantes une à une de résonance culturelle, stimulantes dans leur assemblage ingénieux et parfois espiègle. Par extension, c'est l'humanité qui pourrait sans doute mieux se satisfaire, si chacun des peuples regardait, admirait et s'inspirait de ses voisins, au lieu de courir avec leurs œillères respectives vers dieu sait quoi. Ron Fricke voit en nous une profonde dignité, qu'il exprime d'ailleurs par une caméra moins omnisciente, plus intime que dans Koyaanisqatsi, mais se désole en particulier de l'indifférence orgueilleuse de l'Occident quant aux enjeux de surpopulation, de pollution, de surarmement...
Ces dénonciations ne sont ni inédites, ni profondément nourries, mais leur orchestration visuelle est, en ce qui me concerne, plus frappante que n'importe quelle argumentation verbeuse. Loin de se complaire dans un exercice plastique, l'intention du metteur en scène n'est pas non plus de régler chaque défi humain au cas par cas, mais d'offrir au public une conscience accrue de cette vérité fondamentale et bienfaisante : le bonheur ne viendra pas de l'abondance éponyme, mais de l'équilibre.
Évoqués en parallèle, la majesté des panoramas naturels et la tempérance des systèmes écologiques me laissent moins béatement admirative que métaphysiquement perplexe. Qu'a-t-il bien pu se passer, à un niveau anthropologique, pour que nous déviions tellement de notre harmonie environnante ?
Trop c'est trop
Après avoir vu et applaudi Koyaanisqatsi, il était difficile de ne pas craindre de trouver en Baraka une photocopie léchée mais sans intérêt. C'était sans savoir que Ron Fricke était déjà chef op' du film de Godfrey Reggio, et que par conséquent, il était presque impossible qu'il soit animé par autre chose que d'excellentes intentions. Je me calme sur les négations en cascade, promis.
Koyaanisqatsi parlait de progrès, et Baraka parle de production. Les deux sont liés, mais ne se valent pas non plus ; le montage silencieux s'attache justement à mettre en évidence, pour ceux qui voudront bien l'écouter, que la croyance urbaine de vivre au summum du confort moderne est un fantasme proprement occidental, condescendant et égocentrique, au final pas si loin des mathématiques civilisationnelles de cette vieille ordure de Guéant. Sans que Ron Fricke la pointe du doigt, on reconnaît dans cette idée de confort la patte d'une propagande idéologique généralisée, qui repose sur l'inception du désir fallacieux d'être meilleur que son voisin, par le commerce d'objets et de services accessoires. Oui, c'est mon filtre Mad Men qui parle.
Dans Baraka, ce ne sont pas seulement les images qui se suffisent à elles-mêmes, éclatantes une à une de résonance culturelle, stimulantes dans leur assemblage ingénieux et parfois espiègle. Par extension, c'est l'humanité qui pourrait sans doute mieux se satisfaire, si chacun des peuples regardait, admirait et s'inspirait de ses voisins, au lieu de courir avec leurs œillères respectives vers dieu sait quoi. Ron Fricke voit en nous une profonde dignité, qu'il exprime d'ailleurs par une caméra moins omnisciente, plus intime que dans Koyaanisqatsi, mais se désole en particulier de l'indifférence orgueilleuse de l'Occident quant aux enjeux de surpopulation, de pollution, de surarmement...
Ces dénonciations ne sont ni inédites, ni profondément nourries, mais leur orchestration visuelle est, en ce qui me concerne, plus frappante que n'importe quelle argumentation verbeuse. Loin de se complaire dans un exercice plastique, l'intention du metteur en scène n'est pas non plus de régler chaque défi humain au cas par cas, mais d'offrir au public une conscience accrue de cette vérité fondamentale et bienfaisante : le bonheur ne viendra pas de l'abondance éponyme, mais de l'équilibre.
Évoqués en parallèle, la majesté des panoramas naturels et la tempérance des systèmes écologiques me laissent moins béatement admirative que métaphysiquement perplexe. Qu'a-t-il bien pu se passer, à un niveau anthropologique, pour que nous déviions tellement de notre harmonie environnante ?