Kung-fu master (1988)

Une femme esseulée s'amourache d'un garçon de quatorze ans, alors que le sida et les jeux vidéo deviennent une affaire publique. Les ados s'amusent avec des capotes et boivent jusqu'à se rendre malades ; Paris et la maison n'ont pas changé, et pourtant les repères du quotidien se sont écroulés, silencieusement, parce que dans la solitude, on a cru pouvoir échapper à la marche du monde. Douce et rêveuse parenthèse da…

Holy Motors (2012)

A tous les choix que nous pourrions faire A toutes les vies que nous pourrions mener A tous les mensonges que nous pourrions fuir A toutes nos morts dont nous pourrions nous rappeler A tous les genres que nous pourrions pasticher A toutes les images que nous pourrions créer A tous les rêves que nous pourrions raconter A toutes les aventures que Paris pourrait offrir Il semblerait qu'on puisse…

The Square (2017)

Je ne parviens pas à retrouver immédiatement une source, mais il me semble avoir lu, quand Cannes battait son plein, que Ruben Östlund avait écrit The Square avec la compétition bien en tête. Ayant beaucoup accroché au précédent Turist, je gardais foi en le projet. Hélas, dès les premières minutes, le film prend effectivement des allures festivalières ronflantes... La raison principale pour laquelle The Square m'…

Shoah (1985)

Le documentaire fleuve de Claude Lanzmann affiche nettement son ambition de constituer un témoignage historique essentiel. S'il est certain que Shoah balayera efficacement toute protestation négationniste, malgré ses dignes intentions, je dois avouer que je manque de motivation pour lancer la « seconde époque ». Le cinéaste conçoit l'Holocauste comme la pire tragédie de l'Histoire, et veut lui ériger ce monument aux…

Blade Runner 2049 (2017)

Plus c'est gros, plus ça passe... Bien moins catastrophique que les courts-métrages promotionnels qui l'ont précédé, Blade Runner 2049 confirme tout de même qu'il était inutile de lancer une suite au classique que l'on connaît. Déjà, à contre-courant, je dois bien dire que je trouve que Denis Villeneuve est un pet. Le relativisme moral de Prisoners et Sicario, avec le recul, prend une teinte de lâcheté et d'escro…

Vorace (1999)

J'en suis à une heure de film et je m'ennuie comme un rat mort. Pour un western/survival/comédie noire, ça fait franchement tache... C'est sans doute ce mélange de genres qui empêche l'ambiance de se construire, qui m'empêche d'avoir envie d'y croire, plus encore que le personnage principal amorphe. Les choix musicaux inattendus confirment que la démarche est assumée, mais de mon point de vue l'expérience est ratée.

Harry dans tous ses états (1997)

Un épisode Allen avec ses bizarreries (étrange montage syncopé) mais sans prétention. Certaines répliques tombent à plat, d'autres marchent bien, et c'est pareil pour les acteurs. Dans son intersection des temporalités, du réel et de l'imaginaire, on repense un peu à The Purple Rose of Cairo, si ce n'est qu'ici Allen ne prétend pas expliquer les fantasmes cinématographiques de son public, mais simplement parler de s…

Los Angeles Plays Itself (2003)

La voix-off pleine de morgue fait un peu angoisser d'avoir lancé un docu de trois heures, mais le montage explique rapidement les intentions de Thom Andersen, et il est difficile de ne pas le rejoindre. Amoureux de la ville et de l'architecture, sensible aux questions d'urbanisme autant que d'histoire, il explique avec amertume la façon dont le simulacre Hollywood a dépossédé Los Angeles de son identité. La construc…

Les chaussons rouges (1948)

Il y a quelques années de ça, deux ou trois personnes m'avaient vendu The Red Shoes comme "Black Swan en mieux". En ce qui me concerne, si je devais me fendre d'un parallèle moderne, j'évoquerais plutôt Whiplash. La danseuse des Red Shoes n'est pas à la recherche de la perfection, mais plutôt d'une combinaison de talent, d'amour et de reconnaissance (dans cet ordre de préférence). C'est son hésitation qui la préserv…

Carnage (2011)

Une bonne farce satirique. En parallèle : tristesse amusée face aux affiches publicitaires de "D'après une histoire vraie", placardées des titres des anciens succès du réalisateur, parce qu'aucune revue n'ose dire du bien d'un film loin de faire l'unanimité ? Ou parce que personne n'ose s'associer avec Polanski ? Je ne sais pas si c'est l'endroit pour en débattre intelligemment, mais je dois avouer que je ne c…

Collatéral (2004)

Ma cinéphilie a démarré en tombant à la télé sur Femmes au bord de la crise de nerfs, puis Collateral quelques semaines plus tard. Je ne comprenais pas bien ce qui se passait ni dans l'un ni dans l'autre, mais le caractère et la volonté des metteurs en scène était suffisamment prégnants à travers l'écran pour me marquer au fer rouge. Pendant des années, j'ai craint de relancer le film de Michael Mann, de peur d'y re…

Mother! (2017)

J'aime bien, encore plus que les cinéastes qui croient à fond dans leur vision, les films qui font largement débat. Je regrette de ne pas me retrouver dans le camp des admirateurs de mother!, mais ça ne m'empêche pas de vouloir apporter ma pierre à l'édifice critique d'une œuvre qui, gageons-le, sera regardée d'ici quelques années avec la révérence fascinée ou l'amusement moqueur qui font l'héritage de The Tree of L…

Blade Runner: Black Out 2022 (2017)

Les parties les plus fascinantes du making-of de Blade Runner, Dangerous Days, expliquaient la répartition improvisée du travail de direction artistique. Ridley Scott, capitaine et visionnaire, distribuait ses ordres et exigeait des ajustements jusqu'à obtenir satisfaction, ou bien jusqu'à ce que les producteurs exécutifs le menacent avec une barre de fer. Syd Mead, inspiré par le Moebius de Métal Hurlant, imaginait…

Coeur de verre (1976)

Pile je me censure, face je fais dense, tranche ça importe. File. Je tenais en estime les surréalistes, et pourtant il a fallu que je redécouvre l'écriture automatique par moi-même pour comprendre ses implications, en scandant Elaenia ou en traversant le ciel. Et encore, ce n'est qu'en post-mortem que j'ai compris que ma recherche, d'autres l'avaient déjà parcourue. Proust et Rimbaud sont venus à bout des leur…

Kuso (2017)

Je vois les accusations véhémentes de trash gratuit fleurir de toutes parts, alors je voudrais brièvement rétablir quelques vérités, quitte à ce que ça passe par un texte torché. Kuso parle de peurs inconscientes. Pour celles et ceux qui parviennent à garder leurs oreilles ouvertes dans ce chaos sonore, fear est le mot que vous entendrez le plus. L'idée centrale du film, poussée dans son esthétique jusqu'à un par…

Liberation Day (2016)

Liberation Day tient plus du reportage que du cinéma. Je n'appelle pas ça mettre en scène un film, mais tenir un journal. Et en tant que reportage, le contenu est encore discutable. Le ton est en effet implicitement conciliant, se gardant d'interroger frontalement à la fois le régime nord-coréen et le groupe slovène Laibach, dont l'esthétique totalitaire est pour le moins troublante. Quand les membres ne commentent …

Neurons to Nirvana (2013)

Derrière le titre marketing et une poignée de plans un poil trop new age, c'est un docu très équilibré sur l'usage médicinal de substances psychédéliques : sur les restrictions aberrantes auxquelles elles sont assujetties, et sur les observations et perspectives thérapeutiques. En attendant mon futur texte sur le LSD (que j'aurai du mal à maquiller en critique, mais je ne m'arrête plus à ça depuis longtemps), c'est …

Les tontons flingueurs (1963)

Je venais pour asseoir ma découverte des dialogues de Michel Audiard, quelques mois après Un singe en hiver, et j'ai été servie. Son argot, trop démonstratif dans le premier quart d'heure, s'équilibre ensuite grâce à son travail sur les chutes. Avec un montage et un cadrage d'une qualité que je n'attendais pas pour du ciné français des années 60, et puis une brochette d'acteurs de premier plan, on comprend sans mal …

Matador (1986)

Matador est un épisode ingrat de la filmographie d'Almodóvar, articulation revêche entre ses films Movida et ses drames pulp plus matures. La mort y fait une entrée fracassante et criarde, et l'intraitable Pedro ne peut s'empêcher d'y mêler de grandes louches de sexe. Éros et Thanatos batifolent ensemble, mais sans profondeur. Et puis le programme n'est excitant qu'en pratique, car certaines interprétations hasardeu…

La cité sans voiles (1948)

Bien plus proche du documentaire que du film noir, The Naked City voit Jules Dassin filmer une New York authentique, intérieurs et extérieurs, loin des studios. Cette petite ambition naturaliste est malheureusement à peu près son seul mérite : l'enquête est procédurière, générique et pas intéressante, l'écriture et les interprétations sont assez quelconques, et la voix off est une plaie. Si j'habitais Manhattan, ça …