La voix-off pleine de morgue fait un peu angoisser d'avoir lancé un docu de trois heures, mais le montage explique rapidement les intentions de Thom Andersen, et il est difficile de ne pas le rejoindre. Amoureux de la ville et de l'architecture, sensible aux questions d'urbanisme autant que d'histoire, il explique avec amertume la façon dont le simulacre Hollywood a dépossédé Los Angeles de son identité. La construction du fantasme se décline globalement selon deux axes.
D'une part, les productions se cantonnent souvent à des quartiers "à attractions" : par exemple, alors que les collines permettent des panoramiques spectaculaires, la banlieue sud a dû attendre Friedkin et Tarantino pour gagner un semblant de visibilité. Pour des questions plus souvent esthétiques que budgétaires, l'industrie cinématographique abolit les contraintes géographiques, ne respecte pas la réalité d'un trajet en voiture, ce qui disperse et érode les caractéristiques de chaque zone.
D'autre part, quand Hollywood s'approprie certains terrains, certaines habitations, l'intention de construction est souvent détournée. Ainsi les maisons modernistes se retrouvent souvent associées à des bad guys, corrompus ou vains, ce qui occulte complètement les innovations déployées pour encourager de nouveaux modèles de lieux à vivre. Ennis House se retrouve, d'un film à l'autre, grimé en manoir gothique du XIXe siècle puis en poste de commandement de vaisseau spatial, et le Bradbury Building est relu par Blade Runner autant que Chinatown et L'Arme fatale 4...
Le travail de recherche accompli est volumineux et je ne fais que brosser une partie des problématiques et des exemples soulevés. Police, systèmes de transport, spéculation immobilière... Andersen ne perd presque jamais le fil de son projet, c'est captivant, et suffisamment réfléchi et osé pour conclure avec une demi-heure d'extraits néoréalistes indépendants, qui trace le parallèle entre représentation de la ville et cloisonnement des groupes sociaux. L'amertume mordante d'Andersen est une transposition, sur la défensive, de sa passion pour Los Angeles.
La voix-off pleine de morgue fait un peu angoisser d'avoir lancé un docu de trois heures, mais le montage explique rapidement les intentions de Thom Andersen, et il est difficile de ne pas le rejoindre. Amoureux de la ville et de l'architecture, sensible aux questions d'urbanisme autant que d'histoire, il explique avec amertume la façon dont le simulacre Hollywood a dépossédé Los Angeles de son identité. La construction du fantasme se décline globalement selon deux axes.
D'une part, les productions se cantonnent souvent à des quartiers "à attractions" : par exemple, alors que les collines permettent des panoramiques spectaculaires, la banlieue sud a dû attendre Friedkin et Tarantino pour gagner un semblant de visibilité. Pour des questions plus souvent esthétiques que budgétaires, l'industrie cinématographique abolit les contraintes géographiques, ne respecte pas la réalité d'un trajet en voiture, ce qui disperse et érode les caractéristiques de chaque zone.
D'autre part, quand Hollywood s'approprie certains terrains, certaines habitations, l'intention de construction est souvent détournée. Ainsi les maisons modernistes se retrouvent souvent associées à des bad guys, corrompus ou vains, ce qui occulte complètement les innovations déployées pour encourager de nouveaux modèles de lieux à vivre. Ennis House se retrouve, d'un film à l'autre, grimé en manoir gothique du XIXe siècle puis en poste de commandement de vaisseau spatial, et le Bradbury Building est relu par Blade Runner autant que Chinatown et L'Arme fatale 4...
Le travail de recherche accompli est volumineux et je ne fais que brosser une partie des problématiques et des exemples soulevés. Police, systèmes de transport, spéculation immobilière... Andersen ne perd presque jamais le fil de son projet, c'est captivant, et suffisamment réfléchi et osé pour conclure avec une demi-heure d'extraits néoréalistes indépendants, qui trace le parallèle entre représentation de la ville et cloisonnement des groupes sociaux. L'amertume mordante d'Andersen est une transposition, sur la défensive, de sa passion pour Los Angeles.