Tenue de soirée

un film de Bertrand Blier (1986)

En voulant retrouver l'alchimie de Les Valseuses, ou peut-être le surréalisme de Buffet froid, j'ai jeté mon dévolu sur le deuxième plus gros succès commercial de Bertrand Blier. Douche froide. Tenue de soirée est un traquenard d'homophobie, qui fait son commerce sur à peu près tous les vieux mythes persistants : les homos sont des détraqués sociaux obsédés par le sexe, les homos veulent séduire et « convertir » les hétéros, toucher un homo rend homo, un couple homo se construit sur un rapport de domination, etc.

Avec ça, la veine de misogynie qui parcourait Les Valseuses persiste sans complexe, dans l'air de son temps : typiquement, le scénario parvient à placer en à peine deux minutes la fameuse baffe corrective qui va remettre à sa place une femme énervée. Je reconnais toutefois une petite bulle d'air, dans la scène où Miou-miou dénonce le sexisme des mecs qui pensent que les femmes devraient obéir à leurs moindres volontés, le tout en faisant mine d'y prendre du plaisir.

Dans ces conditions, j'étais à peine surprise de voir la dernière demi-heure se dérouler, qui mélange pêle-mêle meurtre, travestissement, prostitution et transidentité —le mot n'y est évidemment pas, mais c'est bien l'idée derrière le plan final. Et c'était tellement osé pour un acteur de mettre du rouge et de faire un sourire affecté à la caméra que Cannes en a récompensé Michel Blanc. Remarquez, les temps n'ont pas trop changé...