Where to Invade Next

un film de Michael Moore (2015)

vu le 16 septembre 2016 à l'UGC Les Halles

Déjà, il faut comprendre que le titre est franchement trompeur : la question du militarisme n'est pas sur la table, en fait Michael Moore "envahit" des pays d'Europe (+ la Tunisie, et éventuellement le dernier que je n'ai pas eu le temps de voir) pour discuter avec quelques autochtones et "repartir" avec des idées d'acquis sociaux à développer aux USA. Donc ça parle de congés payés, de parité hommes-femmes, de devoir de mémoire, de système carcéral, d'endettement estudiantin, etc.

Sur la question rhétorique, c'est toujours repoussant et malhonnête, Moore bombarde le spectateur comme un montage YouTube, il ne laisse pas le temps d'analyser les chiffres, il ne cite pas ses sources, et puis surtout il joue beaucoup dans le fantasme. Avec dix minutes par sujet, il fait étalage de solutions merveilleuses mais cache régulièrement un tas de choses sous le tapis.

Un autre truc que j'avale pas non plus, c'est l'humour. Déjà, ses blagues xénophobes débiles sur les français qui capitulent et les italiens qui baisent à tout-va, c'est pas parce qu'il cherche à renverser des préjugés sociaux qu'il peut se permettre ce genre de bêtises (et puis de toute façon c'est pas drôle). Et autrement il en fait des tonnes, à jouer le débile américain, qu'il s'agisse de faire boire du Coca en cachette à une gamine ou bien de faire répéter dix fois à un norvégien que Breivik a tué son gosse, "et pourtant vous voulez pas tuer Breivik ?!" On ne sait plus si Moore surjoue l'américain moyen, ou si plus simplement il est l'américain moyen...

Il y a quand même un sacré bon point : contrairement à Fahrenheit, il laisse souvent d'autres gens s'exprimer à la caméra, et sans les charcuter trop des masses au montage. Du coup les idées, à défaut d'être exhaustives, sont authentiques et jamais atterrantes. Un autre truc bien, c'est que ça nous rappelle à nous français que, même si on a des raisons de s'enorgueillir d'un bon système social, on a toujours des progrès à faire (parité, prisons, dépénalisation de la possession de drogue...), et qu'il y a d'autres trucs qui ont l'air de se casser la gueule en ce moment (éducation, discriminations religieuses, politique dans l'urgence...). On va éviter de se moquer trop vite des USA, parce que nos idéaux européens, même si on les connaît, certains restent très balbutiants dans leur concrétisation...