The Tribe

Plemya

un film de Myroslav Slaboshpytskyi (2014)

vu le 3 octobre 2014 au MK2 Beaubourg

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Dans The Tribe, aucune parole n'est prononcée. Les acteurs utilisent tous la langue des signes et aucun sous-titre n'est fourni. Et pour une écrasante partie du film, ce choix se révèle aussi absurde que de distribuer sans sous-titres un film tourné en ukrainien, puisque les personnages, en plus d'être assez « bavards », restent essentiellement entre eux et n'interagissent presque jamais avec le monde parlant. Évidemment, il est possible de comprendre les grandes lignes de l'intrigue, mais si vous célébrez l'absence de sous-titres dans The Tribe, je ne vois pas ce qui vous freine de bannir du reste de votre vie l'utilisation de sous-titres dans n'importe quel autre film.

A quel moment la langue des signes se démarque-t-elle d'une langue orale ? Nulle part ailleurs que pour exprimer la violence d'une discussion, lorsqu'un des délinquants gifle fluidement le personnage principal, sans cesser de parler, ou bien lorsque les deux jeunes filles se disputent à toute vitesse. Portrait peu flatteur d'une création qui mérite bien plus d'éloges ; entre des mains moins adeptes de sensationnalisme, la chorégraphie des corps aurait pu devenir une sublime calligraphie de la langue.

Et quand les pathologies des personnages interviennent-elles dans l'histoire ? Uniquement dans un crescendo de scènes trash : un proxénète écrasé par un camion parce qu'il ne pouvait pas entendre l'alarme de marche arrière, puis une prostituée qui hoquète et râle pendant un avortement, pour finir avec le garçon principal qui fait exploser les crânes de ses tortionnaires endormis à coups de tables de nuit. Grotesque. En réalité, le scénario exploite bassement ces pathologies pour créer un semblant de rythme, et non une histoire. Autrement en effet, ce récit de foyer désanchanté ne cache aucune surprise.

Bref, indépendamment de cette bêtise gratuite qu'est l'absence de sous-titres, le mérite d'avoir tourné un film entièrement en langue des signes s'efface complètement devant la vulgarité de sa construction et la vacuité de son propos. L'enchaînement de plan-séquences, parfois grisants, parfois inutilement étirés, n'est bien sûr pas en mesure de sauver l'ensemble. Échec d'un concept racoleur, The Tribe est incapable de rien dire.