Les Paradis artificiels

un livre de Charles Baudelaire (1860)

Preuve, s'il en fallait, qu'on peut écrire des idioties avec le plus joli des styles.

Avec Les Paradis artificiels, Baudelaire s'embourbe dans un procès truqué contre le haschich, puis l'opium. Même dans les sections où il décrit les effets positifs recherchés, il ne parvient pas à s'empêcher d'aligner des "vicieux" et "diaboliques", avec la subtilité combinée d'un prédicateur télévisuel américain et d'un bulletin de propagande soviétique.

L'erreur grossière à l'origine de cet entêtement vient de l'assimilation entre consommation et dépendance. Le risque existe, mais la contenance aussi. Pourquoi marteler le premier avec tant d'insistance ? Baudelaire, qui reconnaît presque sa mauvaise foi dans certains passages (il se dit incapable de croire en le sevrage du consommateur d'opium dont il reprend le témoignage), reste ainsi incapable d'envisager ces drogues autrement qu'en tant que dangers publics à bannir sans aucune restriction.

Ajoutez à ça l'hypocrisie d'un sociologue/moraliste qui n'a cessé de retourner sa veste sur la question de l'alcool, ainsi que la suffisance judéo-chrétienne d'un poète qui prône, contre toute source d'inspiration extérieure, le fantasme romantique de l'artiste tenace et torturé... Je ne verrai plus ce bonhomme du même oeil.