L'aurore

Sunrise: A Song of Two Humans

un film de F.W. Murnau (1927)

vu le 15 octobre 2016 au Christine 21

Un tear-jerker des familles... ce qui ne le prive ni de sa résonance, ni de ses efforts de mise en scène. D'ailleurs, même si les arrangements visuels de Murnau sont plus souvent invisibles que le contraire, Sunrise ne serait pas aussi redoutable sans eux.

En ce qui me concerne, je ne cacherai pas que j'ai trouvé la première demi-heure assez lourdingue malgré sa grammaire inventive et irréprochable (une mutation ambitieuse et délectable de l'expressionnisme allemand). Un personnage antagoniste manichéen au possible, une histoire de couple brisé plus usée qu'universelle, et puis des passages où Murnau soulignait vraiment trop le trait (l'alternance mari+amante vs. femme qui pleure+bébé qui pleure, au secours). J'ai pris mon mal en patience, vu que j'avais assez confiance en le fait qu'une fois le meurtre accompli ou non, le film serait obligé de prendre la tangente.

Et effectivement, la demi-heure centrale est celle qui m'a le plus séduit. Un changement de cadre inattendu et déboussolant, pour des personnages pas moins confus et perdus. Tempérant les pulsions meurtrières, qui à mon sens ont plus vocation à représenter la trahison au sein d'un couple et tout ce que ça peut impliquer, George O'Brien sous la direction de Murnau témoigne de façon assez déchirante l'impression de sous-merde qu'on peut ressentir quand on blesse quelqu'un qu'on aime (amant ou autre, d'ailleurs). Quant à Janet Gaynor, partagée entre la peur, la haine, l'auto-flagellation, l'amour-propre et l'amour tout court... c'est aussi une sacrée interprétation.

Dommage que Murnau recommence à en faire des tonnes dans le dernier tiers (la kermesse gigantesque, la tempête), mais ça ne ternit pas mon estime de beaucoup.