C'est la dernière incarnation du vaisseau-mère de la flotte rebelle, le fameux boss final. Quatre heures de jeu pour en arriver là, vous avez pris votre temps mais c'est une solide partie. Votre stratégie, au point aux deux tiers de l'aventure et après quelques achats passablement coûteux, a largement fait ses preuves : enclencher le Cloaking qui vous rend invisible en début de combat, charger les missiles Pegasus et Breach, annihiler les boucliers de l'adversaire, puis chauffer tranquillement un Halberd Beam pendant que l'équipage d'en face tente péniblement de boucher le trou que vous avec percé dans leur coque (essayez donc de réparer vos boucliers sans oxygène, fools). Si jamais un dernier bouclier est encore actif, votre fidèle Combat Drone Mark II se fera une joie de le percer, et dans la seconde de vulnérabilité qui suit, votre rayon réduira leurs défenses au zéro absolu. Dans les cas les plus favorables, le vaisseau d'en face a une salle d'armes proche du système de contrôle des boucliers, ce qui permet aussi à votre rayon de limiter les dégâts de la première salve ennemie. Et encore, c'est s'ils parviennent à la lancer : grâce à l'Engi surentraîné qui charge vos missiles et au Cloaking poussé au maximum, il n'est pas rare que vous rendiez impuissant l'équipage d'en face avant même que ces zouaves n'aient réussi à vous cibler. Le plan d'approche est tellement solide que les deux premières versions du boss s'apparentaient plus à des formalités qu'autre chose. Ca n'a jamais été aussi simple.
L'ultime combat commence. Le drone et les missiles viennent rapidement à bout du bouclier spécial de l'ennemi, et vos défenses sont maintenant sur un pied d'égalité. Leurs lasers ne pénètrent pas votre quadruple bouclier, et votre pilote esquive tranquillement les missiles restants, tout en sirotant un Pan Galactic Gargle Blaster. Retour au cloaking, chargement des missiles. Fin du cloaking, lancement des missiles. Triple miss. Hum. En face, deux missiles lancés, un hit sur vos boucliers et un autre sur les armes. Rien qui ne puisse se réparer. Re-cloaking. Re-chargement. Re-triple miss. Merf. L'ennemi fait de nouveau ses deux hits, mais voilà-t'y pas qu'il balance son attaque secrète qui passe à travers vos défenses et casse votre Cloaking. Débandade dans les coursives, votre centre de contrôle des boucliers est en train de cramer et le type dans la salle n'est pas foutu d'éteindre le feu plus vite qu'il ne se propage. Il faut l'envoyer se soigner à l'infirmerie et mettre quelqu'un d'autre sur l'affaire. Le vaisseau-mère en face ne chôme pas, il renvoie des missiles qui détruisent votre avant-dernier bouclier, et coupent l'énergie d'une partie de votre salle de lancement de missiles. Le Breach n'est plus en état de marche mais le Pegasus parvient à balancer ses deux missiles. Double miss. WTF#~!¤%. Pendant que votre équipage tente pathétiquement de réparer les systèmes tombés en rade, l'ennemi balance une nouvelle salve qui achève votre dernier bouclier et tue l'humain qui tentait désespérément de les réparer (RIP Joel de la salle des capteurs). La salve suivante achève de transformer votre vaisseau en torche spatiale, et celle d'après en débris intersidéraux. Trois lignes laconiques vous confirment que vous avez été fessé en une minute, mais que vous pouvez toujours recommencer toute la partie, si vous ragez pas trop. Bienvenue dans le monde fabuleux des rogue-likes.
C'est à la fin de telles parties qu'on se demande un peu l'intérêt de jouer à FTL. Est-ce que ça valait vraiment le coup de passer plusieurs heures dessus, alors qu'un dénouement dramatique et terriblement arbitraire guettait —et qu'on avait pleinement conscience de son éventualité dès le départ ? Qu'est-ce qui pourrait équilibrer la frustration de pareilles conclusions ?
Probablement pas les parties réussies. Le goût du succès se dissipe bien vite, et le jeu n'a pas d'autre récompense à proposer qu'une longue liste de vaisseaux et de dispositions de salles différentes. Avec une durée de partie moyenne de trois ou quatre heures, les développeurs ont bien sûr cherché à rallonger la durée de vie de leur bébé, ce qui n'est pas malhonnête, mais trouve ses limites lorsque les unlockables n'ajoutent plus rien au gameplay. Les chasseurs d'achievements y trouveront sans doute leur compte ; ma motivation à récolter des médailles n'atteint pas le niveau requis.
« Ce n'est pas la destination qui compte, c'est le voyage », répète-t-on à tout-va. En l'occurrence, la construction d'une aventure FTL est plus intéressante que sa conclusion, mais les mécaniques perdent en saveur au fil des parties.
Comme évoqué plus haut, la variété des power-ups du vaisseau, armes, drones, spécialités des membres de l'équipage, téléporteurs et autres systèmes, permet de développer une multitude de plans de gestion. Les face-à-face avec les appareils ennemis se déroulent en temps réel, mais peuvent être pausés à tout moment afin d'affiner les multiples réglages de combat. Sur une musique minimaliste mais suffisamment évocatrice, le joueur explore des nébuleuses, tombe dans des embuscades, apporte son soutien à des vaisseaux perdus de la Fédération, découvre des capsules cryogéniques mystérieuses, fuit des stations infectées par des virus inconnus... Aucune cinématique, quelques lignes évocatrices de texte brut suffisent, et en dépit de la modestie du pixel art, le joueur participant aura tôt fait de se sentir plongé dans sa propre odyssée de science-fiction, entre Star Trek et Battlestar Galactica. Pour un temps, les issues du hasard ajoutent une part d'excitation à l'ensemble, et le travail d'ambiance est payant.
Le souci principal vient de la durée de FTL, surdimensionnée par rapport à la période de découverte. L'émerveillement du voyage et le renouvellement du gameplay ne dépassent pas les 20-25 heures (en mode facile, le moins punitif). Passée cette période, avec son tas de vaisseaux à débloquer, le jeu sous-entend qu'on est loin d'en avoir fait le tour ; pourtant, les différentes stratégies d'armement ne cachent plus de surprise, et les rencontres finissent par se répéter. La permadeath implémentée sans remords est susceptible de ruiner des heures d'efforts et, à l'opposé d'un autre jeu impitoyable comme Super Hexagon, n'est plus compensée par une promesse de progression. La tension ne subsiste alors qu'avec les évènements aléatoires. À l'heure où l'industrie, depuis The Last of Us jusqu'à Papers, Please, glorifie le choix du joueur, FTL a un sacré culot de s'appuyer ainsi sur des actions incontrôlables. J'ai conscience que certains n'y voient qu'une méthode impersonnelle pour relever les enjeux de n'importe quelle scène, mais en ce qui me concerne, je peine à avaler des coups, blessures et défaites indépendants de mes choix. Avec le corollaire encore plus vexant que, maîtrise du jeu ou non, partie parfaite jusqu'au dernier boss ou non, faire des efforts n'a, en définitive, qu'un intérêt insignifiant.
Malgré des idées de gameplay originales et stimulantes, FTL ne parvient pas à se contenter d'une durée de vie pourtant déjà au-dessus de la moyenne du catalogue indépendant. Les mirages d'achievements inutiles et l'influence croissante du générateur d'aléa ternissent l'expérience d'un jeu qu'il aurait autrement été simple d'apprécier. Une machine qui tangue à cause d'un peu d'auto-sabotage.
Masochisme de l'aléa
C'est la dernière incarnation du vaisseau-mère de la flotte rebelle, le fameux boss final. Quatre heures de jeu pour en arriver là, vous avez pris votre temps mais c'est une solide partie. Votre stratégie, au point aux deux tiers de l'aventure et après quelques achats passablement coûteux, a largement fait ses preuves : enclencher le Cloaking qui vous rend invisible en début de combat, charger les missiles Pegasus et Breach, annihiler les boucliers de l'adversaire, puis chauffer tranquillement un Halberd Beam pendant que l'équipage d'en face tente péniblement de boucher le trou que vous avec percé dans leur coque (essayez donc de réparer vos boucliers sans oxygène, fools). Si jamais un dernier bouclier est encore actif, votre fidèle Combat Drone Mark II se fera une joie de le percer, et dans la seconde de vulnérabilité qui suit, votre rayon réduira leurs défenses au zéro absolu. Dans les cas les plus favorables, le vaisseau d'en face a une salle d'armes proche du système de contrôle des boucliers, ce qui permet aussi à votre rayon de limiter les dégâts de la première salve ennemie. Et encore, c'est s'ils parviennent à la lancer : grâce à l'Engi surentraîné qui charge vos missiles et au Cloaking poussé au maximum, il n'est pas rare que vous rendiez impuissant l'équipage d'en face avant même que ces zouaves n'aient réussi à vous cibler. Le plan d'approche est tellement solide que les deux premières versions du boss s'apparentaient plus à des formalités qu'autre chose. Ca n'a jamais été aussi simple.
L'ultime combat commence. Le drone et les missiles viennent rapidement à bout du bouclier spécial de l'ennemi, et vos défenses sont maintenant sur un pied d'égalité. Leurs lasers ne pénètrent pas votre quadruple bouclier, et votre pilote esquive tranquillement les missiles restants, tout en sirotant un Pan Galactic Gargle Blaster. Retour au cloaking, chargement des missiles. Fin du cloaking, lancement des missiles. Triple miss. Hum. En face, deux missiles lancés, un hit sur vos boucliers et un autre sur les armes. Rien qui ne puisse se réparer. Re-cloaking. Re-chargement. Re-triple miss. Merf. L'ennemi fait de nouveau ses deux hits, mais voilà-t'y pas qu'il balance son attaque secrète qui passe à travers vos défenses et casse votre Cloaking. Débandade dans les coursives, votre centre de contrôle des boucliers est en train de cramer et le type dans la salle n'est pas foutu d'éteindre le feu plus vite qu'il ne se propage. Il faut l'envoyer se soigner à l'infirmerie et mettre quelqu'un d'autre sur l'affaire. Le vaisseau-mère en face ne chôme pas, il renvoie des missiles qui détruisent votre avant-dernier bouclier, et coupent l'énergie d'une partie de votre salle de lancement de missiles. Le Breach n'est plus en état de marche mais le Pegasus parvient à balancer ses deux missiles. Double miss. WTF#~!¤%. Pendant que votre équipage tente pathétiquement de réparer les systèmes tombés en rade, l'ennemi balance une nouvelle salve qui achève votre dernier bouclier et tue l'humain qui tentait désespérément de les réparer (RIP Joel de la salle des capteurs). La salve suivante achève de transformer votre vaisseau en torche spatiale, et celle d'après en débris intersidéraux. Trois lignes laconiques vous confirment que vous avez été fessé en une minute, mais que vous pouvez toujours recommencer toute la partie, si vous ragez pas trop. Bienvenue dans le monde fabuleux des rogue-likes.
C'est à la fin de telles parties qu'on se demande un peu l'intérêt de jouer à FTL. Est-ce que ça valait vraiment le coup de passer plusieurs heures dessus, alors qu'un dénouement dramatique et terriblement arbitraire guettait —et qu'on avait pleinement conscience de son éventualité dès le départ ? Qu'est-ce qui pourrait équilibrer la frustration de pareilles conclusions ?
Probablement pas les parties réussies. Le goût du succès se dissipe bien vite, et le jeu n'a pas d'autre récompense à proposer qu'une longue liste de vaisseaux et de dispositions de salles différentes. Avec une durée de partie moyenne de trois ou quatre heures, les développeurs ont bien sûr cherché à rallonger la durée de vie de leur bébé, ce qui n'est pas malhonnête, mais trouve ses limites lorsque les unlockables n'ajoutent plus rien au gameplay. Les chasseurs d'achievements y trouveront sans doute leur compte ; ma motivation à récolter des médailles n'atteint pas le niveau requis.
« Ce n'est pas la destination qui compte, c'est le voyage », répète-t-on à tout-va. En l'occurrence, la construction d'une aventure FTL est plus intéressante que sa conclusion, mais les mécaniques perdent en saveur au fil des parties.
Comme évoqué plus haut, la variété des power-ups du vaisseau, armes, drones, spécialités des membres de l'équipage, téléporteurs et autres systèmes, permet de développer une multitude de plans de gestion. Les face-à-face avec les appareils ennemis se déroulent en temps réel, mais peuvent être pausés à tout moment afin d'affiner les multiples réglages de combat. Sur une musique minimaliste mais suffisamment évocatrice, le joueur explore des nébuleuses, tombe dans des embuscades, apporte son soutien à des vaisseaux perdus de la Fédération, découvre des capsules cryogéniques mystérieuses, fuit des stations infectées par des virus inconnus... Aucune cinématique, quelques lignes évocatrices de texte brut suffisent, et en dépit de la modestie du pixel art, le joueur participant aura tôt fait de se sentir plongé dans sa propre odyssée de science-fiction, entre Star Trek et Battlestar Galactica. Pour un temps, les issues du hasard ajoutent une part d'excitation à l'ensemble, et le travail d'ambiance est payant.
Le souci principal vient de la durée de FTL, surdimensionnée par rapport à la période de découverte. L'émerveillement du voyage et le renouvellement du gameplay ne dépassent pas les 20-25 heures (en mode facile, le moins punitif). Passée cette période, avec son tas de vaisseaux à débloquer, le jeu sous-entend qu'on est loin d'en avoir fait le tour ; pourtant, les différentes stratégies d'armement ne cachent plus de surprise, et les rencontres finissent par se répéter. La permadeath implémentée sans remords est susceptible de ruiner des heures d'efforts et, à l'opposé d'un autre jeu impitoyable comme Super Hexagon, n'est plus compensée par une promesse de progression. La tension ne subsiste alors qu'avec les évènements aléatoires. À l'heure où l'industrie, depuis The Last of Us jusqu'à Papers, Please, glorifie le choix du joueur, FTL a un sacré culot de s'appuyer ainsi sur des actions incontrôlables. J'ai conscience que certains n'y voient qu'une méthode impersonnelle pour relever les enjeux de n'importe quelle scène, mais en ce qui me concerne, je peine à avaler des coups, blessures et défaites indépendants de mes choix. Avec le corollaire encore plus vexant que, maîtrise du jeu ou non, partie parfaite jusqu'au dernier boss ou non, faire des efforts n'a, en définitive, qu'un intérêt insignifiant.
Malgré des idées de gameplay originales et stimulantes, FTL ne parvient pas à se contenter d'une durée de vie pourtant déjà au-dessus de la moyenne du catalogue indépendant. Les mirages d'achievements inutiles et l'influence croissante du générateur d'aléa ternissent l'expérience d'un jeu qu'il aurait autrement été simple d'apprécier. Une machine qui tangue à cause d'un peu d'auto-sabotage.