Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)

Agacé devant Rois & Reine, somnolent devant Jimmy P., sceptique devant Trois souvenirs de ma jeunesse, ma relation avec Desplechin était jusqu'ici assez conflictuelle. Il aura fallu les trois heures de Comment je me suis disputé... pour me réconcilier avec lui.

Pour être honnête, je ne sais pas si c'est dû aux différences entre ce film et les plus récents que j'ai cités, ou bien plutôt à un changement de sensibilité de mon côté. Mathieu Amalric est plus embourbé que jamais dans un labyrinthe d'introspection et de confusion amoureuse(s), ce en quoi je me retrouve pas mal maintenant (et ce qui confirme définitivement que c'est mon acteur préféré, voilà).

Mais est-ce qu'il n'y a pas aussi une certaine chaleur dans ce film que Desplechin aurait perdu par la suite ? En dépit des sentiments contradictoires, des esclandres de couple, des façades hypocrites et de la vanité ambiante (vécue comme une condition inévitable plus qu'une tare à dépasser !), je n'ai pas ressenti un seul moment assister à une fiction artificielle. C'était un bout de vie qui se déroulait sous mes yeux -édité avec un sens romanesque certain, mais partant de bases bien existantes.

L'éclairage, le sens du cadre, l'attention au détail, quoique discrets, ont de quoi satisfaire l'oeil attentionné. J'en viens à croire que, si je râlais contre la mise en scène insipide de Rois & Reine notamment, c'est que mes sens n'étaient pas affûtés pour des effets modestes et retenus ; que j'exigeais une certaine action dans un film plutôt littéraire et sentimental. Un peu ce que propose Laurence Anyways en fait. Sans chercher à défendre qu'une approche serait meilleure que l'autre, aujourd'hui mes faveurs iraient plus à Desplechin qu'à Dolan.

Je sais pas si ma nouvelle religion lasse ceux qui me lisent, mais je dois aussi dire que c'est un film très proustien. Dans ses méandres de souvenirs, ses questionnements interminables, ses digressions vaporeuses, son personnage principal névrosé, ses personnages secondaires volatiles, son humour pince-sans-rire, son incidence de surface et son exhaustivité de substance...