Si les choses étaient un poil différentes, je serais tout le temps fourré au Forum des images. Il ne s'agit plus seulement de parler d'une sélection exceptionnelle ou d'un design inimitable : le Forum, par toutes ses facettes, exulte d'une révérence infinie pour le cinéma. Le septième art n'y a jamais été aussi vivant, dynamique, remis en question, décortiqué et célébré. La programmation thématique, la multiplicité des rencontres et la richesse des collections mises à disposition y sont évidemment pour quelque chose, mais une poignée de minutes suffisent pour ressentir que la somme des efforts des parties est dépassée par un tout véritablement visionnaire. Le Forum propose à son public une panoplie d'expériences sans équivalent, mais son plus grand mérite et de rester avant tout au service du Cinéma.
Pour autant, je n'y suis passé à aucune autre occasion que pour cette précieuse projection du premier Hong Sang-soo, et je ne me précipite pas pour y retourner. Un peu nerveux, j'ai décidé de méditer plusieurs heures devant une armoire à glace dans l'espoir que mon reflet m'explique la raison pour laquelle je me tenais à distance de ce Forum qui, sur le papier, avait tout pour me séduire. Au-delà d'une bête raison pécuniaire, la réponse tient probablement en un mot : l'intimité.
Le Forum conçoit le cinéma comme un art public et met l'emphase sur son partage, ce qui est tout à son honneur, mais mon appréhension du cinéma est plus personnelle. La fréquentation excessive des Halles me freine légèrement, ainsi que les salles un peu trop grandes et trop ouvertes à mon goût (amis claustrophiles bonsoir). Mais il n'y a pas que la physique des lieux qui me met moyennement à l'aise. Le choix de sélections thématiques a plutôt tendance à détourner les projecteurs des réalisateurs et de leurs cheminements internes respectifs. Or j'ai l'habitude depuis quelques années de rechercher cette relation privilégiée avec l'artiste, étudier sa progression d'un jalon à un autre de son œuvre, et c'est pourquoi j'aurais tendance à préférer les cinémas qui proposent des rétrospectives consacrées aux réalisateurs. (C'est d'ailleurs sans doute une des raisons pour lesquelles je ne me précipite pas non plus vers les melting pots créatifs des festivals.) Et puis, tous ces débats, ces master classes, tout ce bourdonnement d'informations et de réflexions m'intimide en même temps qu'il me paraît presque accessoire : donnez-moi un bon film, pourquoi pas quelques amis cinéphiles aussi, et j'aurai déjà grand plaisir à développer une réflexion plus autonome, de mon point de vue sans pour autant sacrifier à sa pertinence.
Bref, pour dire que le Forum c'est génial, mais que je suis clairement pas le spectateur qui saura le mieux lui rendre justice.