J'apprends donc que l'Action Christine n'existe plus et qu'il faudrait dorénavant l'appeler le Christine 21. Je ne sais pas où je pourrais vérifier cette info sans aller interroger quelqu'un (interagir avec des gens, brrrr), vu que la façade arbore toujours le « Studios Christine » des origines de ce bi-salle. Origines d'ailleurs assez récentes, 1973, contrairement à ce que pourrait laisser penser la porte cochère Louis XIV, si si, un monument historique officiel qui coulisse chaque midi pour permettre l'accès à la caisse, et chaque soir aussi (autrement on ne pourrait pas rouvrir le lendemain midi, hé con).
Et d'ailleurs, le réseau Action n'existe plus, tout court. Recollons les morceaux ensemble. Jean-Max Causse et Jean-Marie Rodon ouvrent l'Action Lafayette puis l'Action République sur la rive droite. Au cœur de la Nouvelle Vague, les deux établissements se font rapidement un nom, Truffaut et Deneuve y vont bras dessus, bras dessous, l'histoire de la cinéphilie parisienne s'y écrit. Puis JM & JM décident de revendre leurs salles afin de s'installer rive gauche, avec l'Action Christine, l'Action Écoles, puis l'Action Rive Gauche. Ce dernier devient le bien connu Grand Action en 1992. En 2006, Rodon veut vendre, Causse pas franchement : le couple se sépare, Rodon récupère la gestion des deux cinémas Action restants et Causse repart à l'aventure avec la Filmothèque. En 2011, l'Action Écoles est revendu à Jean-Pierre Mocky (abandonnant du coup le Brady) et devient le Desperado. Fin 2014, Rodon se sépare des dernières salles de l'Action Christine. Une page de l'histoire des exploitations parisiennes se tourne.
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Un peu remué par toutes ces histoires, et surmontant mon aversion à l'idée de m'investir encore plus dans l'écriture du présent dossier, j'ai finalement posé quelques questions à l'Action Christine. Comme annoncé par la presse, il s'avère que c'est une seconde fois Mocky qui a récupéré les clés fin 2014. Sauf que la collaboration n'a pas fait long feu, l'homme ayant une certaine idée de l'exploitation de salle, et l'Action Christine ayant des habitudes respectables et bien établies. En avril 2015, Mocky prend ses cliques et ses claques, un nouveau contrat est signé, et le Christine 21 n'a plus besoin de jouer la vitrine du réalisateur (comme le faisait déjà le Desperado). Tout un feuilleton.
Un peu comme le Mac-Mahon du 16ème, le Christine 21 fait la part belle au cinéma américain des années 30, 40, 50, 60. Mais il s'aventure aussi à la diffusion de films plus récents, un peu à l'image du Saint André des Arts à quelques pas, mais en plus international. C'est une des sélections les plus originales de Paris, mais il y a un obstacle de taille : le Christine 21 ne prend pas les cartes illimitées. Jean-Max Causse rapporte que les cinémas touchent 2,50€ à 4€ sur chaque place réglée avec ces cartes, ce qui rapporte au mieux deux fois moins que le tarif nominal... Certes, les salles art et essai reçoivent des subventions de l'État (ce qui fait râler dans les sphères européennes), mais on reste loin du beurre dans les épinards. Il existe bien la solution de cartes spécialisées, 12 places, 4€ chacune, c'est compétitif. Mais ça représente un investissement financier et moral qui, à ce jour, me tient à distance. Amour contrarié : je souhaite longue vie au Christine 21, mais c'est le seul soutien que je peux lui offrir à ce jour.