Le Chaplin Saint-Lambert

J'ai plusieurs fois parlé d'établissements MK2 qui officiaient en tant que cinémas de quartier. Le Saint-Lambert, lui, n'officie pas en tant que. Il incarne mon idée du cinéma de quartier, jusqu'au bout des ongles. Depuis l'extérieur, ses affiches et ses fenêtres se fondent avec aisance et modestie dans le rez-de-chaussée d'un immeuble d'habitation. Et pour cause : le bâtiment a ouvert en 1935 de concert avec la salle de 300 places –déjà humble à l'époque ! A l'intérieur, c'est encore mieux : photos éparpillées, décorations murales et guirlandes temporaires (ou non ?), inscriptions à gogo, comptoir de vente étriqué et accueillant, clientèle hétéroclite, locaux de réserve grand ouverts trahissant une farandole d'objets colorés et incongrus, et puis des portes, des portes multiples que le nombre rend encore plus espiègles et bienvenues. Ce bombardement visuel rejette naturellement les abonnements illimités, et terrasse la froideur clinique des couloirs des multiplexes ; il se savoure avec respect et complicité.