Sur les Champs, deux UGC et un Publicis Cinémas semblent prendre leurs aises, pendant que le Balzac et l'Élysées Lincoln se battent pour survivre. Le Balzac, ouvert en 1935 avec (pour l'époque !) une modeste salle de 600 places, a toujours été dirigé par des Schpoliansky. Le grand-père et le père connaissent un âge d'or d'exploitation au cours des Trente Glorieuses, avant-premières et stars à l'appui. En récupérant les clés en 1973, le fils Jean-Jacques Schpoliansky s'attendait-il à ce que la suite ressemble à une incessante lutte pour la survie de son cinéma ? Les loyers explosifs l'ont poussé à ajouter deux salles et à développer plusieurs alternatives de fidélisation, soirées opéra, ciné-concerts, et même concerts tout courts chaque samedi soir. La grande salle, splendide, avec ses lustres Art déco et ses sièges en arc de cercle, se prête sans doute très bien autant à des interprétations classiques qu'à des expérimentations plus modernes.
En plus des loyers, il faut aussi faire face aux UGC qui, grâce à des salles de plus en plus nombreuses, tentent d'absorber le public des sorties art et essai les plus rentables. Tant et si bien qu'en signe de protestation, Schpoliansky avait fermé sa salle principale pendant une semaine fin 2011, après que ses invasifs voisins aient réservé l'exclusivité d'exploitation d'un Cronenberg et d'un Kaurismäki auprès des distributeurs. Il n'est pas rare qu'il vienne présenter un nouveau film au public, en quelques mots, juste au début de la séance, en profitant pour exhorter le public à la fréquentation de salles indépendantes. Beaucoup d'investissement et de passion au service d'un idéal de cinéma éclectique et humaniste. Pas simple de défendre la culture sur la plus belle avenue du monde...