L'Étoile Saint-Germain-des-Prés

Aux frontières du Quartier latin, à l'ombre des Deux Magots, ce petit cinéma fait bande à part. La salle, unique, ouvre sur le tard, en 1969. Depuis, ce lieu clos et discret a gagné les faveurs de l'intelligentsia (ainsi que du troisième âge) du quartier Saint-Germain. Si le microcosme de la rive gauche littéraire s'abîme parfois dans l'auto-suffisance, en dire autant de la programmation de leur repaire relèverait de la mauvaise foi. Celle-ci s'illustre en effet par une recherche, un engagement et une foi inhabituelle. Chaque semaine ou presque, un film inédit et un seul est retenu pour être projeté sans interruption (sauf séance exceptionnelle). Et la plupart du temps, sans même avoir attendu les premières réactions de la critique ni du public, la direction vise juste sur les deux tableaux : Tabou, Sugar Man, Le Sel de la terre... Une seule cartouche, un œil pour la qualité, et une queue de spectateurs qui déborde régulièrement sur la rue. Le sniper de Saint-Germain.

Tout porte à croire que la salle a été récemment rénovée, même si je ne peux en témoigner directement. Ses quelques 200 fauteuils sont fort confortables, l'espace respire, et le nom du cinéma est affiché sur un des murs dans un style néo-n'importe quoi accueillant. Les étoiles incrustées au dos de chaque siège s'illuminent en fin de séance, dernier cadeau, retour à la réalité en douceur, mais aussi maintien de l'émerveillement au-delà du générique de fin. Surinterprétation, vous dites ?